jeudi 1 mai 2008

DEPART


C’est avec quelque impatience que j’attends « ma feuille de route… » Je vais devoir quitter les chantiers navals où je me plais beaucoup. Pour quelle destination ? C’est en effet la période du service militaire et la date du départ approche. Gros sujet d’inquiétude pour mes parents qui redoutent que je sois appelé en Algérie où la situation est très préoccupante.

Eh bien non ! Ce sera l’Allemagne pour commencer. Le 5 juillet, mon père m’accompagne à la gare. Son image reste gravée dans ma mémoire : un homme malheureux et inquiet qui regarde ce train s’éloigner, emmenant son fils vers quelle galère ? Jamais ce père n’avait exprimé ses sentiments vis-à-vis de ses enfants, mais aujourd’hui ses yeux trahissaient son émotion.
. De graves problèmes cardiaques commençaient aussi à se manifester chez lui, ajoutant aux difficultés du moment.


Un long voyage me mène à Reutlingen, petite ville de la région de Suttgart, bien reconstruite après les destructions causés par la dernière guerre.
La caserne est « nickel », mais quel entretien cela demandera et que de corvées en perspective. Nous ne sommes plus considérés comme troupes d’occupation, mais forces françaises en Allemagne ( FFA) et devons tenir un certain standing vestimentaire et de comportement. Peu de sorties et pas de rencontres avec la population, il y a bien sûr la barrière de la langue et sans doute une certaine réserve due au passé tragique assez récent.
Nous sommes soumis à une formation intensive qui doit faire de nous de bons « combattants djebel » : endurance à la marche, à la vie rude. Nous apprenons l’art du camouflage, le tir et le maniement des armes. Cela va durer trois mois ainsi.
Aucune formation civique n’est au programme, rien sur le pourquoi de notre présence en AFN.
J’aurais aimé avoir, une information sur l’Algérie, son statut, sa conquête, sa culture, sa géographie, son économie (son pétrole…) Et surtout, comment a-t-on pu arriver à la situation actuelle ? Rien ce n’est pas dans les traditions de l’institution militaire.

Octobre, fin de l’instruction ! Alors direction Marseille ? Eh bien, non, surprise ! Direction la Sarre : Zweibrucken, ville proche de la frontière française où je dois suivre une formation de deux mois afin d’apprendre la maintenance élémentaire du matériel de transmission que je devrai utiliser plus tard.

En fait, dans cette grande caserne, je ferais beaucoup de corvées, encadré par quelques sous-officiers de retour d’Indochine et traumatisés à souhait. De radio, assez peu. De la formation militaire, assez peu, mais de la discipline : beaucoup.
C’est durant cette période qu’un autre sujet de préoccupation va se faire jour : « des bruits de bottes en Egypte ». Je connais l’implication de celle-ci dans la guerre d’ALGERIE. Nasser, son président vient de nationaliser le canal de Suez.
Ce canal est un enjeu important. La FRANCE, l’ANGLETERRE et ISRAEL vont s’allier contre l’EGYPTE. La RUSSIE et l’AMERIQUE s’observent. Que va-t-il se passer ? Je vois ici des matériels de guerre repeints de la couleur kaki à la couleur sable du désert, cela ne présage rien de bon.
Après deux jours d’affrontement entre les Alliés et les Egyptiens, les pressions de MOSCOU et des ETATS –UNIS mettent un terme au conflit. Guerre gagnée sur le terrain, mais perdue sur le plan diplomatique, l’ONU ayant demandé l’arrêt immédiat de l’intervention.

Je n’irais donc pas en EGYPTE.

Le stage terminé, je rentre à Reutlingen et c’est l’attente d’une date de départ pour l’Algérie. Elle se ferait presque attendre cette date…mes copains sont partis depuis trois mois et il me tarde de les retrouver. Enfin voilà ! L’ordre de mission est là. Nous partons quatre retardataires pour Oran via Marseille.

Voyage long et pénible, avec paquetage et intendance, dans des trains bondés. Enfin voilà Marseille, la gare St Charles, On va se prendre un peu de liberté ! En prime, le soleil après les frimas allemands de ce mois de janvier.

Sortie de la gare, c’est sympa ! On nous attend : tout habit kaki est « arraisonné » et dirigé vers les camions. La ville sera calme…pas de bordée avant le départ.

Marseille et sa caserne de transit : le DIM ( dépôt des isolés métropolitains) est un passage obligé et plutôt isolé. Heureusement, ce passage sera bref, car ce « trois étoiles » est loqueteux et sale.
Le bateau nous attend dans le port. L’embarquement, c’est bien comme je l’imaginais. Ainsi qu’on le voit vu sur les photos des journaux : un troupeau chargé se pressant à la passerelle d’embarquement. Au fond de la cale, des transats. Aucune fixation ,ça promet si la mer est agitée !
Je garde cependant cette « photo », autrement plus jolie que celle de l’embarquement : ces quais animés qui défilent sous mes yeux en cette fin de matinée ensoleillée : la « BONNE MERE », l’île d’Elbe, et enfin la pleine mer et la Méditerranée que je contemple pour la première fois.
Il y a un peu de mer, mais heureusement c’est encore supportable. La descente des gamelles de soupe par une échelle verticale sera moins supportable. Mieux vaudrait avoir trois bras.
Eviter en tous les cas d’être sous les échelles lors des services !
Arrivée à Oran, magnifique ville sous le ciel bleu et sa colline de Santa Cruz dominant le port, ce serait presque les vacances. Tout reste maintenant à découvrir: le pays, ses habitants et ce qui se passe ici…

1 commentaire:

Frédéric Baylot a dit…

"Aucune formation civique n’est au programme, rien sur le pourquoi de notre présence en AFN.J’aurais aimé avoir, une information sur l’Algérie, son statut, sa conquête, sa culture, sa géographie, son économie (son pétrole…) Et surtout, comment a-t-on pu arriver à la situation actuelle ?"


OUI mais ... penser c'est commencer à désobéir !!!

amitié


frédéric ♥